Cette année, c’est un Voyage d’hiver que propose le Château de Versailles en lieu et place de ses expos-événements de confrontation avec des maîtres de l’art contemporain qui avaient lieu de juin à octobre. Changement de format, de calibre et de calendrier pour la 10ème édition. Voyage d’hiver, inauguré le 22 octobre dernier et programmé jusqu’au 7 janvier prochain est une invitation à se promener dans les Bosquets pour y découvrir des oeuvres contemporaines choisies beaucoup par le Palais de Tokyo, le lieu parisien hyper pointu en la matière, et un peu par Alfred Pacquement, le « Monsieur art contemporain » de Catherine Pégard, la Présidente de Versailles. Je dirais qu’heureusement il y a les Bosquets et que c’est une occasion unique de les découvrir en hiver puisqu’ils sont habituellement fermés en cette saison.
Et puis, après ces « chocs esthétiques », on pourra se glisser dans la peau des visiteurs du Versailles vivant des trois rois, les trois Louis, le XIVème, le XVème,et le XVIème, en consacrant quelques heures à l’immense et très intéressantes exposition patrimoniale « Visiteurs de Versailles, Voyageurs, Princes, Ambassadeurs, 1682-1789 », conçue en partenariat avec le Metropolitan Museum of Art de New York. Inaugurée elle aussi le 22 octobre dernier, elle se tient jusqu’au 25 février. Puis elle rejoindra New York, du 9 avril au 29 juillet 2018.
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L’allée d’Eau ou allée des Marmousets.
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Le bassin de Neptune.
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Le bassin du Dragon.
Catherine Pégard fait de cette exposition « Voyage d’hiver » une manière de montrer les jardins. On pourrait rétorquer à la Présidente de l’Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles qu’il n’était nul besoin de nous imposer des oeuvres contemporaines, la plupart de très mauvaise facture, hideuses et aux propos prétentieux et indigents pour ce faire. Oeuvres de jeunes artistes en majorité qui semblent tous n’avoir jamais pris la peine d’étudier quoique ce soit en leur domaine pour privilégier des expressions brutes qui font vite long feu faute de puissance ou de vision dérangeante. A de rares exceptions près.
La demande faite à ces artistes choisis par le Palais de Tokyo, Jean de Loisy son actuel Président, Rebecca Lamarche-Vadel, Yoann Gourmel, commissaires de l’exposition, et par Alfred Pacquement, commissaire habituel des expos d’art contemporain du château de Versailles, était, je cite, » de nous entraîner dans la mythologie d’hier, de raconter, dans leurs oeuvres uniques, la même histoire sans fin, celle des métamorphoses de la nature et de la vie. » Et, ajoute Catherine Pégard, « où célébrer cet anniversaire des liens incandescents du patrimoine et de la création mieux que dans l’intimité des bosquets? »
Bof, pourquoi pas si les oeuvres sont au niveau. Sauf que là, comment dire? ce fut plutôt une succession d’ébahissements à la découverte de par exemple « L’oeil » du Canadien David Altmejd, une sorte d’homme-chien, un loup-garou dit l’auteur, hyper réaliste en poils et résine, bourré de percings, d’inclusions, dans le Bosquet des Trois Fontaines, petite chose très laide dans ce bosquet assez majestueux avec ses trois bassins sur trois niveaux.
Que dire des installations sonores constituées uniquement de micros suspendus à des filins et de hauts-parleurs ? Des voix, des bruits, peu perceptibles, incompréhensibles pour la plupart, et censés pour Dominique Petitgand dans le Bosquet du Dauphin » évoquant la mémoire défaillante, la perte de sens du temps et de l’orientation proposer un cheminement tant mental que physique, » un texte et une cartographie intimes et ouvertes, propre à chaque personne qui se promène et écoute. » L’autre, celle de l’Anglais Oliver Beer dans le Bosquet de la Girandole fait filtrer les voix et les bruits des visiteurs à travers la résonance des tuyaux des fontaines vides pour créer » une composition harmonique des sons ambiants du parc. »
Et toutes ces oeuvres, montrées pour la plupart dans les photos, ont des prétentions de sens qu’on est bien en peine de saisir si on se contente de les regarder. Médiocrité de la manière, mais boursouflure de la matière.
Finalement, est-ce une si bonne idée de faire cette » Visite d’hiver » ? On y risque d’en conserver une vision très dénaturée de ces bosquets au mieux de leur beauté quand les fontaines sont en eau et quand la végétation frémit de vie.
Riddles, Sphinx Otto protecting Earth from Humankind, oeuvre de Marguerite Humeau installée dans le Bosquet de l’Arc de Triomphe, près du bassin de Neptune. L’artiste, née à Cholet, a 31 ans. Ce sphinx Otto est censé protéger la planète des dangers et des menaces provoquées par les humains.
Fontaine de la France triomphante, ( de l’Espagne et de l’Empire), modelée en plomb par Jean-Baptiste Tuby, dans le Bosquet de l’Arc de Triomphe aménagé à partir de 1677.
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L’oeil, l’une des deux sculptures installées par le Canadien de Montréal David Almejd, né en 1974.
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Le souffle, placé lui tout en haut du Bosquet des Trois Fontaines initialement aménagé par Le Nôtre et Louis XIV.
Sept colonnes dans lesquelles une réaction chimique entre des concrétions de bronze et de l’électricité sécrètent une brume et un vieillissement accéléré du métal. Signé du Marocain Hicham Berrada, 31 ans, et installé dans le Bosquet des Dômes qu’avait conçu Le Nôtre en 1675.
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Bustes de femmes en aluminium du Breton Jean-Marie Appriou, 31 ans.
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Ces bustes et ce cygne évoquent les saisons et leur ordre immuable et renaissant.
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Ces scuptures sont censées s’inspirer de la tradition ornementale des pots à feu et des termes des jardins.
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Elles sont installées dans le Bosquet de l’Obélisque, lequel est en fait un puissant jet d’eau au centre du bassin.
Dry Clay Head, une tête monumentale en bronze à l’aspect de terre séchée et craquelée du Néerlandais Mark Manders, 49 ans. Elle est placée au centre du Bosquet de l’Etoile qui doit son nom simplement à la disposition des allées en son centre.
Le Bosquet de l’Encelade met en scène la chute d’un titan qui s’était mesuré à Jupiter. Une sculpture en plomb de Gaspard Marsy dans le bassin de ce bosquet aménagé par Le Nôtre en 1675-1676. L’Américain Cameron Jamie y a installé 9 sculptures en céramique de la série Spine Station, des totems dont la fonction serait d’accentuer le rapport conflictuel entre la nature, les hommes et les dieux. Rien de moins ! Au spectateur de voir si « l’énergie qui en émane provoque chez lui un effet d’envoûtement » comme l’espère l’artiste.
Sheila Hicks dans le Bosquet de la Colonnade dû à Jules Hardouin-Mansart dans les années 1684-1686. La plasticienne américaine de 83 ans y a emmailloté la sculpture de Girardon, l’enlèvement de Proserpine, les bandes textiles rejoignant les branches prélevées dans le parc étant censées représenter une horloge cosmique.
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L’Américain Rick Owens, né en 1962 et surtout connu comme couturier « antifashion » qui décrit son travail comme la rencontre entre Frankenstein et Garbo dans un bar SM, a emmailloté quatre sculptures en marbre…
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… et une en bronze du Bosquet de la Reine aménagé en 1778 à l’emplacement du Labyrinthe. « Point exact où le drapé, le plissé, les épaisseurs créent une sculpture, et pourtant composent déjà un vêtement. » nous explique-t-on…
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…C’est dans ce Bosquet que s’était déroulé en 1784 un épisode de l’affaire du Collier, la rencontre entre le cardinal de Rohan et la demoiselle d’Oliva déguisée en Marie-Antoinette.
Le Bosquet des Bains d’Apollon, inspiré par le peintre Hubert Robert en 1778 qui voulut y mettre en scène un conflit entre l’art et la nature. Les statues de Girardon, Regnaudin, Guérin et des frères Marsy, les trois groupes d’Apollon servi par les nymphes et les Chevaux du Soleil, commandés par Louis XIV, sont l’art. Le rocher-grotte et la prairie sont la nature. Le sculpteur américain John Giorno, né en 1936 et icône des premiers films d’Andy Warhol, a eu la modestie, ou la sagesse inspirée du bouddhisme tibétain qu’il fréquente, de n’y mettre que deux pierres gravées chacune d’un court poème. Comme il a eu raison.
Dans le Jardin du Roi, aménagé en jardin paysager en 1816-1817 par l’architecte Alexandre Dufour, l’Argentin Tomas Saraceno, 44 ans, a installé ces structures aériennes qui s’inspirent des toiles d’araignées pour proposer des architectures utopiques qui flottent dans les airs. Il paraît que c’est contrer » l’idée que l’homme est le centre du monde tout en souhaitant lui donner une place respectueuse dans l’écosystème ».
C’est un Parisien, Stéphane Thidet, né en 1974, qui a sévit dans le Bosquet de la Salle de Bal créé entre 1680 et 1685 par Le Nôtre, avec cette oeuvre réfrigérée et réfrigérante, Bruit Blanc. C’est la reconstitution de l’ambiance post-apocalytique d’une salle de spectacle à l’abandon. Sic. Un télescopage temporel de deux espaces ayant eu la même fonction. On donnait en effet des spectacles de danse au centre de ce Bosquet doté de gradins face à une cascade.
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Dans l’Allée du Labyrinthe, seul vestige de celui créé par Le Nôtre pour éduquer le Dauphin, et détruit en 1776, la Française Louise Sartor, 29 ans, a accroché ces miniatures.
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Avec ce bestiaire de peintures sur bois très figuratives, mélangeant styles, époques, codes et conventions, elle inviterait à un vertige temporel !
Ue série de cinq sculptures, Floraisons pour Nollopa, composées avec des containers-poubelles en PVC rouge fondu au lance-flammes. C’est le travail d’ une Française de 74 ans, Anita Molinero qui y voit là « le « nécessaire et le suffisant » qui permet de réunir le paradigme de (sa) sculpture. » Euh, et encore ? Le nécessaire, le commun, le transversal, ce serait l’élément-poubelle. Le suffisant, l’arrogant, serait dans la couleur rouge et dans le fait de réunir et sublimer ces deux particularités dans une sculpture. Bref. Ce tas de poubelles a été placé dans le Bassin du Miroir.
Le bassin de Flore, l’un des bassins des quatre saisons, symbolise le printemps. La déesse romaine des fleurs a été sculptées en plomb doré par Jean-Baptiste Tuby entre 1672 et 1679.
VISITEURS DE VERSAILLES
Louis XIV l’avait voulu. Versailles devait être ouvert à tous. Le roi et sa Cour y donnaient un spectacle quotidien et les visiteurs ont afflué dans ce Palais, le plus accessible de toute l’Europe. « Touristes », avant même que la notion existe, Princes, Ambassadeurs du monde entiers ont été les visiteurs de Versailles avant ceux d’aujourd’hui, plus de 7 millions chaque année.
L’exposition, conçue par Bertrand Rondot, conservateur en chef du patrimoine, chargé du mobilier et des objets d’art au musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, et Daniëlle Kisluk-Grosheide, Conservatrice au département de la sculpture et des arts décoratifs européens du Metropolitan Museum of Art de New York, rassemble plus de trois cents oeuvres où l’on voit le Versailles de 1682 à 1789, les « tours » mis en place au départ de Paris en coche d’eau sur la Seine jusqu’au château de Saint Cloud pour venir le visiter, les guides de visite édités à l’époque, les réceptions d’ambassadeurs, jusqu’à ceux du Siam, les cadeaux, les visites des Rois et des Princes d’Europe, les costumes de Cour… Très riche exposition qui est aussi la première collaboration d’envergure entre Versailles et le Metropolitan. Comme en écho de la célèbre visite de Benjamin Franklin à la Cour de Louis XVI en 1778 et au mécénat exceptionnel de John D. Rockefeller dans les années 20.
Réception de l’Ambassadeur de Turquie par Louis XIV.
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Tenue de gardes français.
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Grande livrée de la Maison du roi.
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Robe volante dite robe de chambre vers 1720-1730.
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Vue du château vers 1682.
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On arrivait de Paris par la Seine jusqu’au château de Saint Cloud.
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Détail d’un paravent, vue du château vers 1769-1770.
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Le Tsarevitch, sous le nom de Comte du Nord, vint en 1782.
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Gustave III, roi de Suède vint voir Louis XVI incognito sous le nom de Comte de Haga en 1784.
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Christian VII, roi du Danemark et de Norvège en visite en 1768.
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Pierre 1er de Russie vers 1717.
Le jeune Louis XV et l’immense Ambassadeur des Pays-Bas.
Maquette de l’escalier des Ambassadeurs.
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Les cadeaux: vases de Sèvres.
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Plat et soupière de Sèvres.
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Canon d’apparat octogonal en argent offert par les ambassadeurs de Siam.
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Eventail représentant le déjeuner de la famille royale. Vers 1760-1775.
Louis XVI et Marie Antoinette.
buy ascorbic acid india. Le Bosquet des Bains d’Apollon peint par Hubert Robert en 1777. Louis XVI avait fait abattre les arbres mourants pour les remplacer.
Photos©Dominique Bouchet
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Château de Versailles
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— Dominique Bouchet
Architecte de formation, journaliste par un détour de l'histoire dans les années 70. Une première approche du tourisme et du voyage via sa fonction de DGa au groupe Liaisons/Wolters Kluwer jusqu'au début des années 2000, l'hebdo pro Tour hebdo et le salon Mitinternational étant dans son portefeuille opérationnel.Puis, il a créé la Compagnie Editoriale, créatrice de magazines et fournisseur de contenus éditoriaux.