On imaginait un Pays de Galles du bout du monde avec des églises, des pubs, des moutons et… le rugby ! Le ballon ovale avec les All Blacks, visage barré de la feuille de fougère, emblème du pays, sont bien au rendez-vous. Ainsi que les Maori. Mais on découvre aussi une nature somptueuse : des glaciers, des fjords, des forêts à la végétation touffue, des plages où le granit donne au sable des reflets dorés. Récit de deux semaines d’aventures en Nouvelle-Zélande.
TEXTE ET PHOTOS: Michèle Lasseur©
ANouméa, en Nouvelle-Calédonie, l’Austral est à quai. Le commandant du navire, David Marionneau, accueille ses hôtes en veste blanche, en haut de l’échelle de coupée. Etrange comme le confort douillet et feutré du bateau ne reflète pas les humeurs potentielles de l’océan.
Cap vers la Baie des Îles. Une première escale durant laquelle les passagers vont faire plus ample connaissance avec les Maori. Les falaises à l’extrême-nord de la Nouvelle Zélande portent le nom d’un explorateur français, Surville. Il y arriva en décembre 1769. Au même moment, James Cook remontaient la côte Est. Tous deux cherchaient l’Australie. 2 ans plus tard, c’est dans cette même baie que notre Marc-Joseph Marion Dufresne fut tué et mangé par les indigènes. La Nouvelle-Zélande aurait pu être française ! J’apprends ainsi que le traité de Waitangi entre la Couronne Britannique et les Maoris fut signé ici dans la Baie des Iles en 1840. Ils reconnaissaient la souveraineté des Britanniques sur la Nouvelle- Zélande
La troupe locale, Pitowhenua, en tenue de cérémonie, accueille les visiteurs avec un « Kia Ora » (« bonjour ») sonore. Pour témoigner leur amitié, les Maoris se frottent le nez l’un contre l’autre, m’avait-on dit à Paris. J’avais envie de les connaître… Bienvenue en terre maorie ! Ici ils tirent la langue avec délectation.
Il faut d’abord répondre au défi lancé par les guerriers de Waitangi. André, un breton costaud, se retrouve seul face aux imposants Maoris. Il doit ramasser une feuille de fougère placée au sol pour assurer aux guerriers que nous venons en paix. Nous entrons ensuite dans la maison pour assister à une série de danses, de chants et de jeux traditionnels. La troupe Pitowhenua montre aussi le maniement des massues. Pif ! Paf ! Poum ! Les lames des herminettes sont brandies par le chef. « Que c’est beau » s’exclame une dame qui fait force photographies des Messieurs Maoris.
La performance culturelle se termine avec le traditionnel « haka », la danse guerrière destinée à effrayer les ennemis et rendue mondialement célèbre par l’équipe de rugby des « All Blacks » qui l’exécute avant chaque rencontre. On voit aussi des jades, des étoffes et des canoës qui se transmettaient de génération en génération. Ainsi que le plus grand canoë de guerre de cérémonie du monde.
A LA DECOUVERTE D’AUCKLAND ET DE SES ENVIRONS
Passagers, conférenciers et « habitués » des croisières se rencontrent. L’un des passagers, par exemple, a déjà fait 7 croisières avec le Ponant. Il possède le grade de grand-amiral et, quand il croise le commandant, c’est l’accolade. Le théâtre ne désemplit pas. Prochaine escale : Auckland. Plusieurs conférences sont proposées, durant lesquelles les conférenciers enseignent leur savoir avec passion, projections à l’appui.
Cosmopolite, centre financier et cinématographique, Auckland est une ville aérée de 1,5 millions d’habitants. La Sky Tower (328 m) colonne vertébrale de la cité s’élance vers le ciel. Plus américaine que british, Auckland prend des airs de Seattle à CBD (Central Business District) : air marin, gratte-ciels et façades en béton où s’accrochent des escaliers de secours. Un petit tour sur Queen Street, la rue principale avec le port d’un côté et l’université de l’autre. On y trouve tout : centre commercial, théâtres, cinéma, Starbucks. On rayonne facilement vers le quartier de Ponsonby (bars et restaurants branchés), le Auckland Domain (un immense parc avec le Auckland Museum) ou encore Devon port, un quartier, accessible en ferry.
« Big Little City » comme Auckland aime se faire appeler, prend des airs de village à Parnell (à l’est de Queen Street), un des quartiers les plus huppés. Il est prisé pour ses belles demeures victoriennes. Quelques minutes en bus suffisent pour rejoindre le CBD.
Visages bruns des polynésiens et chevelures noires des vahinées, Aukland est aussi la plus grande agglomération polynésienne du monde. Ils sont originaires des petites îles du Pacifique. Samoans,Tonguiens, Fidji, habitants venus des îles Cook témoignent d’une intégration plutôt réussie dans le « pays du long nuage blanc » (nom maori de la Nouvelle-Zélande).
Ainsi, jour après jour, nous, passagers, devenons des spécialistes des Maoris. Nos connaissances s’appuient autant sur des cycles de conférences que sur la fréquentation des intéressés et la relation par les plus zélés, d’anecdotes très variées concernant les mœurs, parfois décriées. Le croisement des expériences le soir, au bar, permet à chacun d’enrichir son savoir. Certains consignent leurs expériences dans des carnets ou des livres reliés.
Un soir, je partage la table d’un couple de jeunes gens récemment mariés. « Quel étrange voyage de noces faites-vous là donc » m’exclamais-je avec enthousiasme ! Votre jeunesse dénote avec l’âge habituel auquel on s’intéresse aux croisières atypiques et onéreuses, avec les moyens appropriés à leur financement ! J’apprends par Fred, informaticien, que ce voyage constituait un rêve, rêve qu’il a pu faire partager à sa fraîche épousée. Une passion pour les oiseaux, qu’il catalogue, met en fiche, photographie.
La visite du lendemain le ravit. Une luxuriante frange de collines peuplées d’oiseaux sépare Auckland de sa côte sauvage à l’Ouest. Des paysages côtiers spectaculaires, un écosystème unique, « cette « éco-excursion est une véritable bouffée d’air », se réjouit Fred. Il compte bien photographier un petit oiseau noir dont la gorge s’orne d’une aigrette blanche et dont le nom maori est « tui ».
En 30 mn, nous arrivons au Arataki Visitor Center, point de départ pour le parc régional de Waitakere Ranges. Il couvre plus de 16.000 ha de forêts pluviales avec des sentiers de randonnées. Avant de pénétrer dans la forêt, il faut respecter quelques directives comme nettoyer ses chaussures avant et après son arrivée, retirer graines et résidus de terre de ses poches et se cantonner aux sentiers balisés pour éviter d’endommager les plantes. Protocole obligatoire qui ne laisse pas de faire sourire les esprits critiques. Mais l’essentiel ne demeure-t-il pas de faire prendre conscience à chacun des dangers sournois de la mondialisation ?
Dans la forêt pluviale primaire, on découvre des fougères géantes et des kauris vieux de 1000 ans. Ces conifères peuvent vivre jusqu’à 2000 ans et atteindre une hauteur de 50 m.
Les merveilles thermales de TAURANGA
L’Austral est un beau navire. Imposant, lisse, métallique, bien dessiné, bien construit. Ses concepteurs lui ont donné l’équilibre, une taille combien raisonnable par rapport aux mammouths qui transportent 4.000 passagers dans les mers chaudes. Il n’emporte pas une ville dans ses entrailles d’acier, mais un village de 130 habitants payants au plus, pour l’agrément desquels travaillent 130 personnes, équipage et personnel hôtelier.
La cabine 504 m’est attribuée à l’avant-dernier étage de cette forteresse flottante, c’est aussi élégant que sur les illustrations des magazines de décoration, une vaste fenêtre ouvre sur un petit balcon où il ne manque que des géraniums.
Le très attentionné commandant Marionneau présente l’équipage : Antoine Borrel, chef mécanicien et donc plus commandant en second que Pierre-Marie Ducournau le second, Arash Ariabod médecin du bord, Mario Pires « directeur hôtelier ». Le commandant ne commence jamais une annonce, au travers du réseau de haut-parleurs, autrement que par l’antienne « chers passagers… »
Pendant toute journée de mer, des conférences sont organisées dans l’auditorium, variante de l’amphithéâtre grec, avec de confortables fauteuils. Et grâce à l’internet disponible à bord, je peux me documenter sur le passé tellurique et les volcans qui ont façonné la Nouvelle-Zélande, thème de la prochaine excursion. Le lendemain un autocar nous conduit jusqu’au lac de Rotorua et les merveilles thermales de Wai-O-Tapu (« Eaux sacrées » en maori) niché dans la brousse et sculpté par des milliers d’années d’activité volcanique. Les rayons du soleil qui décroche sous la couche de nuages éclaire des cratères creusés par l’action acide des eaux souterraines, des piscines de boue en ébullition et des eaux de toutes les couleurs qui sortent sous forme de geysers. De nombreux minéraux contenus dans l’eau –, soufre, arsenic, antimoine, oxyde de fer, manganèse, silice… créent des couleurs jaune pâle, émeraude, orange, rouge brun, violet, blanc. Des fumerolles soufrées s’échappent des crevasses. Clou du spectacle : la « palette de l’artiste », piscines de différentes couleurs et la « piscine de champagne » (60 m de diamètre, 60 de profondeur) qui pétillent de bulles à la surface. Je poursuis ma promenade sur le sentier bordé de manukas en fleurs. Le miel de manuka aurait toutes les vertus !
Très rapidement et comme sur tous les bateaux de croisière, des clivages sociologiques se forment vite, les tables de restaurant deviennent des places fortes où les efforts des commensaux visent à barrer l’accès aux intrus… Ici on va dénoncer les prétentieux, là-bas les intellectuels ou les trop vieux, voire les dissidents ou les crétins. La table la plus sollicitée reste celle du Commandant ou à défaut celle des « guides». Pour ceux qui n’ont pas été invités à la table gouvernementale, il reste la consolation de voir le Commandant s’adresser à eux avec sa jovialité quotidienne, de préférence devant témoins…
Les autorités néo-zélandaises ont découvert des coquillages collés à la coque du bateau depuis le passage du navire en Papouasie Nouvelle-Guinée. « Un raz-de-marée de coquillages devant lequel on se sent bigorneau » plaisante un passager. L’Austral est immobilisé pendant 24 h à Tauranga, dans la Baie de l’Abondance (Bay of Plenty ») nommé ainsi par l’incontournable James Cook. Grande séance de nettoyage avec des plongeurs qui s’affairent sous la coque. Une nouvelle espèce envahissante pourrait bouleverser l’équilibre écologique. Le théâtre ne désemplit plus ! Les conférenciers-naturalistes font assaut de cours magistraux, illustrés de nombreuses projections. Nous sommes des ambassadeurs et devons préserver l’environnement. L’itinéraire est modifié et une visite à terre impromptue se fera à Waiheke, connue comme « l’Île du Vin ». Les vignerons du coin remportent régulièrement des prix pour la Syrah. Les passagers sont ravis. Enfin de l’exercice dans les vignes avec les sirènes de la dégustation !
CABLE BAY, WAIHEKE ISLAND : PETIT TOUR D’HORIZON ŒNOLOGIQUE
On raconte que ce fut un évêque français qui planta les premières vignes en 1819. Mais les vignobles centenaires ne sont pas légion et l’industrie viticole n’a guère plus que 30 ans. Lucas Petru est propriétaire de 11 ha de vignes dans l’île de Waiheke. Ses premières vignes ont été plantées en 1998 avec du Chardonnay, Syrah, Vionnet, Merlot et Pinot Gris.
« Nous travaillons sur des terres de la période Jurassique et nos vignes poussent là où les dinosaures règnaient ». Ce qui explique le succès de ses vins, c’est une savante alchimie entre le climat maritime et les anciennes structures du sol pour produire des vins rouges et blancs au caractère distinctif.
Son premier Chardonnay en 2002 a gagné la médaille d’or au concours international à Londres, en compétition avec plus de 40.000 bouteilles du monde entier. Il produit aussi d’excellents Sauvignon blanc dans la région de Marlborough, le cépage roi appelé aussi « savvy » qui offre des arômes uniques. Quant au Pinot noir, il incarne le défi de la prochaine décennie à Marlborough.
Les fjords
L’Austral fait cap vers les fjords à l’extrême sud-ouest de l’archipel. Les chutes d’eau tombent sur des centaines de mètres dans de profonds fjords noirs creusés par les glaciers. Une forêt humide s’accroche au flanc des montagnes. Le Milford Sound est le plus encaissé et le plus dramatique des fjords de la région. Considérée comme meilleur poste d’observation, la passerelle est occupée par de nombreux passagers émerveillés de la taille des pics qui sortent de l’eau comme des aiguilles. Il règne un calme absolu, où ne résonnent que le chant des d’oiseaux et le bruit de l’eau qui tombe du haut des falaises.
« Chers passagers le 11 novembre 1770 le capitaine Cook découvrit un fjord encore inconnu, aux falaises noyées dans la brume, le Doubtful Sound » annonce le commandant. Cook n’osa pas s’y aventurer car il le jugea trop étroit. Il est trois fois plus long et dix fois plus étendu que Milford Sound. Le temps est clair, les falaises à pic projettent leur reflet sur les eaux noires du fjord. « C’est un moment formidable » s’exclame Monsieur Edouard, croisiériste Grand Amiral, qui admire les cascades. Des albatros piquent une tête dans l’eau pour pêcher des poissons. Tandis que des dauphins escortent le bateau.
L’Austral s’est figé dans le calme d’une idée de l’éternité. Hors de question d’imaginer, d’écrire, de supplier que le temps s’est arrêté ou que le temps est suspendu, ou que le temps n’existe plus, ainsi qu’il est convenu de déclarer quand les émotions ne peuvent plus se traduire par des mots autres que ceux de l’omniprésent espace !
Nouméa
Avant de monter sur l’Austral, une étape de 24 heures a été prévue dans la capitale de la Nouvelle-Calédonie devenue depuis 1999 une collectivité d’outre-mer. Les rues sont larges et aérées piquetée du rouge vermillon des flamboyants. Ici peu de Kanaks ou de Caldoches disséminés sur le reste du territoire mais des « Zoreilles », des métropolitains quoi !
Sitôt logée ma valise à roulettes dans la chambre de l’hôtel Méridien, je me dois de filer au centre culturel Tjibaou , une institution qui joue à Noumea sur le théâtre de la notoriété universelle un rôle équivalent à celui de la Tour Eiffel. Réalisé par l’architecte Renzo Piano, il abrite des expositions permanentes utiles pour en savoir plus sur la culture mélanésienne. Quelques rares touristes saluent les nombreux employés. Je termine la visite en extérieur, sur le chemin botanique kanak.
Le tour de Nouméa est un « digest » qui permet de digérer la diversité de cette ville qui ne fut originellement qu’un chef-lieu et port d’une colonie pénitentiaire. Le front de mer s’étend sur plusieurs kilomètres avec des plages, des clubs nautiques, des promenades, des restaurants. Et le « must » : l’Anse Vata, la Promenade des Anglais de Nouméa.
Je file ensuite au phare Amédée qui baigne dans un lagon classé au patrimoine mondial de l’Unesco. La plupart des visiteurs viennent passer la journée à la plage. La mer, héberge quantité d’espèces de poissons, des tortues, des dauphins, des requins et des serpents marins, les tricots rayés, à la piqûre mortelle. En un après-midi, je teste la diversité des animations, le jeu en vaut la chandelle : excursion en bateau à fond de verre, découverte du récif corallien, démonstration de montée au cocotier, buffet à volonté et show de danses tahitiennes ! L’une des principales attractions de l’île reste son phare (52 mètres, 247 marches) construit en fer puddlé à Paris en 1860. Démonté puis acheminé par la mer jusqu’en Nouvelle-Calédonie, il fut remonté sur place en 1865.
PRATIQUE
Croisière : « L’Essentiel de la Nouvelle Zélande »
Croisière Pacifique et Océanie
du 12 mars 2020 au 21 mars 2020
10 jours / 9 nuits
Port de départ : Auckland
Port d’arrivée : Dunedin
Navire : LE LAPEROUSE
Autres dates disponibles :
du 15 janvier 2020 au 24 janvier 2020
du 24 janvier 2020 au 2 février 2020
du 21 mars 2020 au 30 mars 2020
A noter aussi ce circuit signé Voyageurs du Monde:
Ile du Nord + Ile du Sud : voyage itinérant 15 jours. De 4.000 à 5.000 €
Site Internet
Site Internet
Formalités : passeport en cours de validité.
Pas de visa nécessaire pour les ressortissants français.
Santé : aucun vaccin requis
1 € = 0,62 NZD